Ecole primaire Ampère à Grenoble, classes de Cécile Blanc et Séverine Pastorel (CE2)
Claire Hamelin et Guillaume Lang
Étant tous deux physiciens, nous avons choisi pour cet
atelier ASTEP d’aborder le thème « Ombre et Lumière ». Ce choix a été
motivé par notre expérience d’enseignants en optique à l’UJF dans le cadre de
nos missions d’enseignement, l’adéquation avec le programme scientifique de CE2
qui aborde la notion d’ombre, et le fait que 2015 est l’année internationale de
la lumière.
Nous sommes intervenus pendant six séances d’une heure
chacune dans les deux classes, à raison de deux séances par semaine. Ces
séances comprennent une séquence sur l’ombre dans le cadre du programme, une séance
d’ouverture, plus courte, sur la lumière, et une séance d’évaluation des
connaissances.
Les objectifs pédagogiques au terme de la séquence sur
l’ombre étaient les suivants :
- Savoir formuler clairement des hypothèses avec un vocabulaire adapté
- Apprendre à élaborer et mettre en œuvre un protocole expérimental pour tester les hypothèses
- Décrire les observations de façon factuelle et les interpréter
- Argumenter pour défendre ou invalider une théorie
Les principales connaissances à acquérir étaient :
- Notions d’ombre propre et d’ombre portée, ainsi que leurs principales caractéristiques, objets opaques vs transparents
- Être capable de représenter le cône d’ombre sur un schéma
- Notions de base d’astronomie, système Soleil-Terre-Lune, alternance jour/nuit et notion d’éclipse
Dans la pratique, la séquence sur l’ombre s’est déroulée de
la manière suivante (les plans de séances sont disponibles à la page précédente):
- Séance 1 : introduction/découverte
Après nous être présentés à la classe, nous avons proposé
aux élèves un petit jeu/exercice, qui avait pour consigne :
« Dessinez votre ombre de façon réaliste. »
Nous avons sélectionné cinq dessins qui présentaient de
fortes différences et les avons accrochés au tableau.
Dans une phase suivante nous avons demandé à quelques
volontaires de décrire un dessin de leur choix, et de le comparer avec un autre
qui présentait soit une similitude, soit une différence avec ce dernier.
Consigne supplémentaire : dire si cette caractéristique paraît réaliste ou
non, puis nous demandions à d’autres de donner leur opinion sur ce point.
Exemple : l’ombre touche-t-elle le personnage ou non, a-t-elle des détails
(yeux…) ou non, est-elle colorée…
A l’issue de cette phase, nous avons fait coller aux élèves
leur dessin dans leur cahier, puis nous leur avons demandé, sur la base de ce
qui avait été dit, de proposer une question à se poser pour caractériser
l’ombre. Exemple : « Une ombre peut-elle avoir des
détails ? »
Ils ont eu pour consigne, pour la fois suivante, d’émettre
une hypothèse sur la réponse à la question, et d’élaborer un protocole
expérimental pour la tester (fait avec les maîtresses en notre absence).
- Séance 2 :
Cette séance était la première à caractère expérimental. Les
élèves, réunis dans une salle dans laquelle nous avons fait régner la pénombre,
étaient répartis en groupes pour réaliser leurs expériences. Nous avons mis à
leur disposition du matériel : lampes de poche, Playmobils, divers petits
objets, une boîte…
Pendant la phase d’expérimentation, nous sommes passés voir
chaque groupe pour discuter un peu et les guider au besoin. A l’issue de la
phase d’expérimentation, chaque groupe a fait une brève présentation de son
expérience et de l’interprétation devant le reste de la classe, chacun avait le
droit de dire s’il était convaincu ou non, et dans le cas contraire, de
proposer une autre expérience pour mettre en défaut les conclusions tirées de
la première.
Après quoi, nous sommes retournés en classe pour prendre des
notes et conserver une trace écrite dans le cahier de sciences. C’a été
l’occasion d’introduire du vocabulaire et, pour la première fois, de tracer un
schéma explicatif du phénomène de l’ombre. La lumière, si elle est interceptée
par un obstacle, ne peut pas éclairer la zone qu’il cache : c’est l’ombre.
- Séance 3 :
Nouvelle séance d’expérimentation, cette fois sur le thème
de l’astronomie. Avec un globe terrestre et un projecteur qui représentait le
Soleil, nous avons conduit les élèves à élaborer le raisonnement suivant :
l’alternance jour/nuit est due à la rotation de la Terre autour de son axe, il
fait nuit lorsqu’on se trouve dans l’ombre propre de la Terre. Puis, par
groupes, nous les avons laissé jouer avec une lampe de poche et deux boules en
polystyrène de différentes tailles, représentant à eux trois le système
Soleil-Terre-Lune. La Terre tourne autour du Soleil et la Lune tourne autour de
la Terre.
Lors de ce mouvement,
il peut arriver que la lune s’intercale entre le Soleil et la Terre. L’ombre
projetée de la Lune sur la Terre correspond au phénomène de l’éclipse lunaire.
De retour en classe,
nous avons dessiné des schémas et expliqué brièvement les saisons, ainsi que
les notions de solstice et d’équinoxe.
- Séance 4 :
Consacrée à des exercices, de mise en contexte du
vocabulaire et de dessins d’ombres, à la fin de la séance nous avons passé un
quart d’heure à répondre à des questions sur l’ombre et la lumière, et plus
généralement la physique, posées par les élèves.
- Séance 5 :
Séance d’ouverture consacrée à la lumière. Le programme
était légèrement différent dans les deux classes. Dans la partie commune, nous avons démontré
le principe de la propagation de la lumière en ligne droite. Un laser et de la
poussière de craie qui matérialise le faisceau ont beaucoup intéressé les
élèves. Puis nous leur avons montré le phénomène de diffraction :
lorsqu’un petit obstacle (ici un cheveu) est mis sur le trajet de la lumière,
son ombre n’a pas la forme à laquelle on s’attendrait naïvement. Avec deux
lasers différents, nous avons montré que les différentes couleurs sont affectées
différemment par ce phénomène. Puis nous avons montré un réseau optique aux
élèves, et expliqué le fonctionnement. Des traits très fins provoquent la
diffraction et séparent la lumière blanche en lumières colorées. Exemples de
dispersion de la lumière dans la vie quotidienne : l’arc en ciel, les
tâches colorées dans l’huile de vidange, les CD (nous leur avons montré), les
ailes de certains papillons…
Puis dans une des classes nous avons fait un petit
complément d’astronomie, tandis que dans l’autre, nous avons fait une
expérience : chaque élève a fabriqué un petit disque coloré, qui quand on
le fait tourner rapidement sur la pointe d’un crayon (tenu avec de la pâte à
fix) donne l’illusion d’être blanc en raison de la persistance rétinienne (lien
avec les dessins animés).
- Séance 6 :
Évaluation des connaissances, préparée conjointement avec
les maîtresses.
- Séance 7 (bonus) :
Invitation au spectacle d’ombres chinoises organisé par Cécile Blanc et ses élèves.
Conclusion :
Travailler avec des enfants est une réelle opportunité, pour
eux d’avoir un interlocuteur différent de la maîtresse/le maître qu’ils voient
toute l’année, et qui est spécialiste en sciences, ce qui apporte un plus en
terme de rigueur dans la démarche scientifique. Le dialogue a été très constructif
et l’occasion de se rendre compte des écarts énormes de niveau au sein de la
classe (entre ceux qui ont des notions d’astronomie et ceux qui ne savaient pas
ce qu’était une ombre). Il est très facile de réinvestir des expériences
proposées aux élèves de licence et d’en adapter l’explication à des élèves de
primaire, ce qui force à être très clair et à aller droit à l’essentiel. Le
fort accent mis sur l’expérience et la formulation d’hypothèses ainsi que le
débat est une façon efficace d’initier à la méthode scientifique et à la
rigueur dans le raisonnement.
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